Pensée de la semaine 6
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Pourquoi a ton perdu nos conteurs ?
En écoutant un ami congolais me raconter son enfance, ces pensées ont traversé mon esprit......pourquoi n'a t on pas ce don de parole ? Pourquoi croire des choses irréelles joue t il toujours un rôle dans la société congolaise?
Cependant ce qui me frappe , c´est la coexistence de la vie moderne avec ses voitures, ses trains, sa radio, son téléphone d´une part et la croyance aux revenants, aux jeteurs de sort, à la métamorphose de l´homme en animal et la peur qu´une éclipse du soleil soit la fin du monde d´autre part.
Pourtant ce n'est pas par
liberté de parole puisque des interdits verbaux peuvent concerner le lieu et le
moment : on ne doit pas proférer certaines paroles le jour ou à telle période
de l'année. Ils peuvent également être relatifs au vocabulaire, au sexe de
celui qui parle, à son âge… D'un point de vue plus linguistique, ils peuvent
concerner le débit de parole, la prononciation. Par exemple, il est interdit
(comme dans la plupart des sociétés) de désigner directement la fonction excrétive,
d'évoquer un animal dangereux (surtout le serpent) ou d'évoquer un événement
pénible comme la mort de peur qu'il ne se réalise. L'interdit peut être de
prononcer le nom des personnes car prononcer le nom de quelqu'un, " c'est
s'assurer une emprise magique sur lui ".
Dans les sociétés orales, on apprend à bien parler, mais avant tout on
apprend quand parler et quand se taire. Car comme le dit un proverbe swahili :
" Parler est bon, se taire est bon " .
La parole dans les sociétés
orales a également une valeur éducative. L'éducation quotidienne passe par
les contes et les proverbes, leçons de choses à fin moralisatrice. C'est aussi
la parole de l'initiation qui fait de l'enfant un homme. La parole véhicule les
valeurs traditionnelles de la société. Elle communique les connaissances
techniques et ethniques. Elle est aussi le véhicule des valeurs religieuses.
Elle facilite l'intégration des novices dans une nouvelle société religieuse
et leur donne une culture spécialisée. Elle les fait membres d'un groupe. Mais
si elle est pédagogique, la parole est aussi une marque de connaissance et de
sagesse.
C'est pourquoi les chefs et les notables doivent exceller dans l'art de parler.
Par leur élocution originale et articulée, ils représentent la norme de la
société. Chez les africains, comme dans de nombreuses sociétés, bien parler
c'est faire preuve de culture.
Mon ami me dit " En Afrique chaque fois qu’un vieillard meurt c’est une bibliothèque qui brûle. C'est comme les " griots", ils disparaissent les uns après les autres "
Le terme griot, d'origine française, signifie musicien héréditaire, chanteur de louanges royales…un peu comme les troubadours.
Traditionnellement, le griot avait une relation très proche de la Cour Royale où il agissait en tant qu'historien, diplomate et conseillé ; tout cela à travers des chants et louanges.
C'est son rôle de garant de la tradition orale qui en a fait un personnage important. En Afrique, le jeune griot apprend de son père, grand-père et de ses oncles l'histoire de leur société
Ce savoir est ce qu'ils transmettent en chansons. Parce que la transmission du savoir est héréditaire, il est facile de dire si un musicien est griot par leur nom de famille. Les plus connus sont les Diabatés, les Kouyatés et les Cissokhos.
Les Cissokhos sont les descendants de Jali Madi Woulin Cissokho qui composa le premier morceau jamais joué à la Kora intitulé "Kilifa"; c'est en quelques sortes le A de l'alphabet.
C'est au Mali que l'on retrouve généralement les familles griotte. Cependant quelques familles Mandingues, comme celle de Seckou vivent au Sénégal et plus généralement en Afrique de l'Ouest.
La situation de Seckou est inédite. En effet, sa lignée est royale (les Keita) et normalement il n'aurait jamais dû devenir musicien. Cependant, le sort en a décidé autrement. Il est né et a été éduquer dans la famille de sa mère, les Cissokho et c'est cela qui lui a permit de devenir un Jali / griot.
La Kora est l'instrument des griots et probablement le plus sophistiqué des instruments du sud du Sahara. On peut dire que cet instrument peut se décrire entre la luthe et la harpe. Elle est composée de 21 cordes, parfois 22. Dans la basse Casamance, on trouve jusqu'à 25 cordes. Le grand Oncle de Seckou, Jali Messing Cissokho, en possède 28!
La Kora est supportée par un long manche de bois de Teak et s'encastre dans une Calabas (fruit non comestible) recouvert de peau d'antilope ou de vache.
La peau qui entoure la galabas et le trou sont à la base du son. C'est également dans ce trou que des contributions sont faites pour montrer son appréciation au musicien.
Et je reste là, sans voix, perdue dans mes pensées, peut être un peu affolée par la déculturation du patrimoine ancestral des pays qui ont tout oublié une fois leurs livres refermés.......................